Chanje : L'interview

Arpentant divers univers musicaux, Chanje se situe à la croisée des genres, explorant le renouveau à chaque création. Imprégné de musique depuis son plus jeune âge, il allie chant, composition et écriture avec une aisance naturelle.

Avec son nouveau projet « HUMAIN », Chanje franchit une étape majeure dans sa carrière. Cet opus de 13 titres plonge au cœur de ses cicatrices physiques et mentales, tout en offrant une fusion audacieuse d’influences variées, inspirées par des artistes tels que Sevdaliza et Billie Eilish. À travers une ambiance sombre et futuriste, il crée un univers musical où sensibilité et créativité se rencontrent, mêlant les mondes pour façonner le sien.

Crédit Photo : Matthieu Croizier
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Tu viens de sortir ton projet HUMAIN, comment tu te sens quelques jours après la sortie ?

Chanje
Artiste

Vraiment content, j’ai eu énormément de bons retours. Les gens me disent que c’est mon meilleur projet. Donc non, vraiment très heureux des retours qu’on me donne. Et puis, j’ai envie de passer à la suite, c’est bon, le truc est évacué, il est accouché, j’ai envie de continuer.

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T’es déjà dans une mentalité d’avancer et de passer à autre chose ?

Chanje
Artiste

Ouais, en fait, moi, le projet, ça fait longtemps que je l’ai écouté (rires). J’ai passé tellement de temps dessus, j’en suis très content, et j’ai envie qu’il vive quand même, mais moins à titre personnel. J’ai envie de faire autre chose. Après, j’suis trop fier de ce projet, trop content. Il parle aux gens, et ils me le font savoir, donc trop heureux.

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T’as toujours baigné dans la musique, t’as commencé à faire des sons très tôt. Comment c’est arrivé dans ta vie et à quel moment c’est devenu une vraie passion pour toi ?

Chanje
Artiste

C’est arrivé vraiment tôt dans ma vie parce que je viens d’une famille où mon papa fait de la musique, il joue de la guitare. Mon frère est un très très bon guitariste aussi, ma sœur et ma mère, on chante. On a toujours chanté dans la famille. Mon père avait toujours sa guitare, il nous faisait chanter même pendant les réunions de famille. Ça a toujours été une passion, je pense, depuis que je suis né ou en tout cas depuis tout petit. Après, le moment où je me suis dit que j’aimerais bien en faire un taff, je pense que c’était vers 17/18 ans. J’étais déjà dans le rap, parce que j’ai commencé le rap à 10/11 ans. Et donc à 17 ans, je me suis dit : « Vas-y, j’aimerais bien faire du rap, ce serait cool si je peux essayer de faire un peu mon trou. » C’est comme ça que ça s’est passé.

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Pour se plonger dans le projet HUMAIN, il y a un aspect que je trouve vraiment intéressant. Au-delà de l’introspection et de la créativité que tu y mets, on ressent une certaine sensibilité par rapport au monde qui t’entoure, au vécu accumulé au fil du temps. J’ai l’impression que c’est la première fois que tu te livres autant sur tes ressentis. Est-ce que c’est bien le cas ? Si oui, comment est-ce que tu as réussi à passer ce cap ?

Chanje
Artiste

C’est vrai. J’essaye de plus en plus d’être le plus sincère possible dans ma musique, mais d’une façon moins violente que je l’ai été avant, en tout cas, de façon moins “pleurnicheuse”. Quelque chose d’un peu plus vrai en fait, comme dans ma vraie vie, comme je le vis, comme je le vois, comme je le sens. Et donc là, de plus en plus, et notamment sur ce projet, j’ai réussi à me livrer un peu plus qu’avant, à être plus réel. Surtout en me rendant compte que tu dois juste dire des trucs tout cons, des phrases toutes simples, parfois même un peu drôles, mais derrière, ça veut dire quelque chose, ça montre une réalité. C’est vraiment essayer de faire un état des lieux sur comment je vois le monde. Dans ce projet, c’est pas une vision magnifique du monde, c’est pas nécessairement triste pour être triste, mais plutôt blasé. L’idée c’est que, « c’est comme ça, le monde est moche ». Puis, dégager un peu ce truc de haine du monde, que le monde nous aime pas, et qu’on l’aime pas non plus, et puis c’est comme ça.

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Au fur et à mesure des projets, tu as exploré beaucoup de directions artistiques différentes. Comment se déroule ton processus de création ? Est-ce que tu pars d’une idée précise ou est-ce que ça vient plutôt en cours de route ?

Chanje
Artiste

Pour ce projet, j’ai pris un an et demi pour le faire. C’était un choix de ma part, et de la part de mon équipe aussi. J’étais un peu perdu, que ce soit musicalement mais aussi dans la vie, et je me suis dit : « Vas-y, prends un an, un an et demi, prends ton temps pour savoir quelle musique tu veux faire, comment tu veux la faire. » C’est à ce moment-là que j’ai commencé à faire mes prods, ou en tout cas à m’impliquer beaucoup plus, que ce soit dans les prods, dans l’image, dans tout. J’ai même commencé à faire du graphisme… Bref, le processus créatif, voilà, ça s’est passé comme ça. 90% de ce que j’ai fait au début, c’était à jeter. Soit ça ne voulait rien dire, soit c’était basique, soit ça n’avait aucun sens… J’ai expérimenté pendant un an et demi. Je pense pas encore avoir trouvé mon son, parce que c’est un truc que tu ne trouves jamais vraiment, c’est quelque chose sur lequel tu continues de bosser tout le temps. Mais en tout cas, c’est comme ça que ça s’est passé, le processus créatif : de l’expérimentation, et charbonner.

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La direction artistique avec les visuels, même le titre, c’est vraiment venu en cours de route, à force de bosser dessus, c’est ça ?

Chanje
Artiste

C’est ça, j’avais une idée, le premier truc que j’me suis dis c’était que je voulais parler des monstres, ça revient énormément dans le projet, tout le projet tourne autour de ça, c’est pour ça qu’on l’as appelé HUMAIN d’ailleurs, parce qu’il y’a le titre d’avant que j’avais sorti qui s’appelait MONSTRE, donc je pouvais pas l’appeler de la même façon, le projet, et puis même le parallèle entre monstres et humain, mais à la base j’voulais parler de ça, c’était la seule idée que j’avais en tête, le fait d’être un monstre, le fait d’être perçu comme un monstre, le fait de haïr le monde parce que t’es un monstre, et puis j’avais toutes ces inspis un peu Tim Burton, John Carpenter, Guillermo del Toro, Lovecraft…Enfin, tous ces trucs un peu glauques, monstrueux, et je voulais faire un truc étrange comme ça, et de la, avec Alix, à qui je fais un gros big up, avec qui on as bosser sur la direction artistique, nous est venus l’idée du monde en carton, parce qu’on voulais pas représenter le monstre trop violemment, trop brutalement, on voulais que ça se fasse ressentir.

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Justement, par rapport au titre MONSTRE, quand je l’ai écouté, et je pense que c’est pareil pour beaucoup de monde, je me suis vraiment pris une claque musicale. J’étais persuadé qu’il allait enchaîner sur un projet, qu’il teasait quelque chose. Puis, quand tu as annoncé HUMAIN, j’étais sûr qu’il serait dedans. Je me demande : est-ce qu’à la base le morceau devait être dans un projet ? C’était vraiment qu’un pur single ?

Chanje
Artiste

Au début, je voulais qu’il soit dans le projet, mais en fait, on a pris un an et demi à sortir HUMAIN, donc ça n’avait plus trop de sens de le mettre dedans. Mais je suis d’accord, c’est un de mes meilleurs sons, et c’est un peu dommage qu’il soit arrivé à un moment où j’ai eu un gros break-down, où je me suis dit “il faut que je prenne du temps pour moi, que je travaille sur qui je suis”, humainement parlant, avec une grosse remise en question. C’est un peu dommage qu’il soit sorti avant, parce que c’est vraiment un de mes sons préférés de moi-même, et il aurait été très bien dans le projet. Mais pour moi, ça fait partie du même arc, donc MONSTRE restera un morceau sorti avant, mais avec cette petite aura de “ah, c’est lié à HUMAIN” Y’a un petit lore qui me plaît, c’est sympa, mais ouais, c’est très lié.

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Pour en revenir aux visuels qui entourent le projet, il y’a un univers qui est très travaillé, presque cinématographique. Que ce soit à travers le clip de MERRICK, la cover, ou les autres visuels, on voit que ça a été bien pensé. Comment s’est passée cette réalisation ? Est-ce que tu as beaucoup délégué ou est-ce que tu avais déjà tes idées en tête ?

Chanje
Artiste

Sur ce projet, j’ai énormément mis la main à la pâte, et je pense que j’ai un peu rendu fous les gens autour de moi avec ça ! Mais vraiment, j’étais super impliqué. Bien sûr, je travaille avec des gens extérieurs qui sont bien plus talentueux que moi dans plein de domaines. Je m’entoure de personnes incroyablement talentueuses. Comme je te l’ai dit, Alix pour la DA, ou Rayan à la réalisation du clip de MERRICK. Moi, j’arrive avec un milliard d’idées, je fais beaucoup de moodboards, même dans le clip, je me suis beaucoup impliqué dans la réalisation. Je demandais tout : est-ce qu’on a un storyboard ? J’aimerais bien un découpage comme ça… Je voulais vraiment tout suivre de près.

Pour la DA, c’était pareil. Je proposais mes idées, puis Alix me faisait des retours, et je choisissais parmi ses propositions. Je disais “ok, j’aimerais bien ça, ou ça”, et ainsi de suite. J’étais très impliqué dans tout le processus de création. J’ai conscience de mes limites, donc je délègue beaucoup, mais je veux comprendre ce que je délègue pour pouvoir aussi travailler dessus. C’est comme un joueur de foot qui a besoin d’un entraîneur : ce n’est pas parce que tu es bon que tu n’as pas besoin de gens autour de toi. Il faut toujours être bien entouré, c’est super important. Je délègue, mais je veux toujours comprendre ce que je fais pour pouvoir participer pleinement.

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Le projet se veut très introspectif, avec un univers très triste et sombre. On est plongé dans une atmosphère vraiment particulière, on y retrouve une écriture très singulière. C’est ton premier projet qui sort en physique. Comment est-ce que tu le considères ? Est-ce qu’on peut parler d’album plutôt que de mixtape ?

Chanje
Artiste

Les gens parlent d’album, j’ai l’impression. Je ne réfléchis pas du tout comme ça. Si on parle français, j’ai l’impression qu’un album, c’est juste un EP où tu mets de l’oseille.

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Je capte, mais il y a quand même ce truc-là de “un album, c’est un projet à part entière”. Il y a un univers qui est proposé, c’est comme un film, alors qu’un EP, c’est que de la musique.

Chanje
Artiste

Je vois. En fait, le truc, c’est qu’à part peut-être “INJECT.8” et “BLACKBIRD”, qui sont peut-être plus des EP comme tu l’entends, tous mes projets, je les ai travaillés comme des albums. C’est juste que je deviens meilleur avec le temps, et avant, je n’avais pas les skills ni les compétences, c’était moins ressenti. Mais que ce soit “Pacemaker”, “E.M.I” ou “ADN”, j’ai toujours travaillé comme ça, en essayant de créer des univers. C’est ça qui m’intéresse dans le fait de faire un projet. Faire un EP et juste mettre des sons, ça peut être libérateur, parce que, quand t’es artiste, des fois, ça prend 4000 ans avant que ta musique sorte, et ça rend fou. Ça peut être cool aussi pour l’instantanéité, mais moi, j’aime bien travailler sur des gros trucs. Après, en vrai, je ne me pose pas trop la question. Pour moi, ce sont des projets, ce ne sont pas des albums ou des EP, ce sont des pièces. Fais-en ce que t’en veux. Mais je pense que, marketingement, je ne le vendrais pas encore comme un album. Je ne pense pas que ce soit l’album de la maturité (rires), mais j’aimerais qu’il y ait plus de moyens quand j’arriverai vraiment avec mon album. Je ne sais pas si c’est de l’ambition, mais en tout cas, j’aimerais que ce soit encore plus juste que ce que l’on a fait là.  

Sur l’écriture, y’a une petite anecdote. Je fais une soirée pour l’anniversaire de Hash 24 (rappeur), et il y a Limsa d’Aulnay. On parle, ça fait quelques temps qu’on se connaît. Je discute avec lui, et on a une discussion un peu profonde sur le rap et le temps. J’étais un peu en mode “je sais pas si je dois continuer ou arrêter”. Et là, il parle de moi et il me dit que la première fois qu’il m’a écouté, il était en mode “nan, le petit il est chaud, mais je comprends pas qui il est. Musicalement, il n’y a rien à dire, c’est trop fort, mais lyriquement, je comprends pas ce que tu veux me dire.” Ça, c’est un truc qu’on m’avait beaucoup dit, et j’essayais de le prendre en compte, mais je pense que j’arrivais pas à le capter. Et là, Limsa me le dit. En plus, pas longtemps après, c’est son anniv, et il met sur Insta “4 décembre” (le morceau). Je l’écoute, et l’écriture me fait trop cogiter. Je me dis “en fait, c’est ça.” Il y a un truc qui s’est débloqué. Je sais pas comment dire, mais ça a fait sens d’un coup. Je me suis dit qu’il fallait que j’écrive comme ça, écrit vrai, écrit juste. J’essaie de plus en plus d’écrire comme ça. En vrai, il le sait pas du tout (rires), mais je crois que Limsa a une place importante dans ma fierté pour ce projet et dans mon écriture.

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C’est vrai que même en termes de compréhension, c’est ton projet le plus parlant. Je sais pas si c’est le plus “simple” à écouter, mais en tout cas, en termes de lyrics, ça l’est mille fois.

Chanje
Artiste

C’est compliqué dans les sonorités, mais pour être honnête, le truc, à chaque fois avec mes équipes, c’est “il faut simplifier, il faut simplifier.” C’est le but à chaque fois. Même là, on est en mode : “Ah, HUMAIN, il est trop compliqué”, il faut simplifier encore, parce que j’ai tendance à avoir de la pudeur, un peu de timidité. Donc, j’en mets beaucoup, je mets plein de trucs, mais j’essaie de simplifier encore plus ; donc HUMAIN, comparé aux autres, il est tellement plus simple à écouter, à comprendre, dans la direction artistique, dans les lyrics… J’espère que, par la suite, ce sera encore meilleur.

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Qu’est-ce qui explique ça ? Parce que c’est vrai que ta musique a toujours été très éclectique, tu as toujours osé casser les codes, même à une époque où il n’y avait pas grand monde à le faire. Est-ce que tu saurais expliquer comment ça t’est venu ? Parce que c’est vrai que, dès le départ, et d’ailleurs, ça a fait que d’évoluer au cours des projets, mais tu pitchais déjà ta voix, c’était déjà des prods très digitales. Dis-moi si je me trompe, mais on y ressent un peu d’influences électro, peut-être même un peu alternatives. Est-ce que c’est simplement la magie d’Herman, ton producteur ?

Chanje
Artiste

En vrai, je pense que c’est un mélange d’un peu de tout, vu que je chante aussi depuis petit, j’ai toujours utilisé ma voix, et y’avait pas trop de différence pour moi entre chanter et rapper, quand j’ai commencé à rapper, j’adorais autant Hayce Lemsi qu’un autre artiste français que mon daron me faisait écouter, y’avait pas trop de différence pour moi. Arrivé aux premiers projets, c’est vrai que quand tu le dis, c’était un peu digital avant l’heure, je pense que ça s’est fait de pleins de façons, Herman il est très électro et j’pense qu’il y’a eu la touche d’Herman, et moi j’étais beaucoup dans les artistes de cette vibe la, y’avait Sevdaliza, c’était le début de Billie Eilish, que je prends encore et qui sont encore des réfs pour moi aujourd’hui, y’avait aussi 6LACK, donc ça à été beaucoup de réfs je pense, après c’était aussi un peu d’instinctivité, j’me suis pas trop posé la question, on faisait et ça rendais ça, et j’étais là “ah, j’aime bien” et puis c’est tout en vrai.

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T’as quand même dû puiser un peu dans les states pour tes influences à ce moment-là ? Parce qu’en France, il n’y avait pas ce que tu faisais, ça n’existait pas tant. 

Chanje
Artiste

Ouais, mais je sais pas si je le faisais consciemment. En fait, c’est sûr que j’ai un milliard d’influences, même françaises. Par exemple, Nemir, personne ne va le comprendre, mais ma voix, dans la façon de chanter, même comment je la place, c’est Nemir depuis longtemps. Mais évidemment, il y a des influences américaines. On peut citer 6LACK, on peut citer James Blake, Sevdaliza, Billie Eilish, et même du Rosalía sur certains trucs, certaines textures. Évidemment que j’ai plein d’influences. Après, j’essaie d’y penser un peu quand je crée, mais à un moment, ça devient toujours un autre truc, parce que c’est dur de faire comme quelqu’un, c’est super dur. C’est comme ça que ça a marché. Il y a beaucoup d’influences américaines, mais il y a aussi des influences françaises. Je pense à Nemir et à Tiakola, qui est aussi une grosse influence.

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Dans MERRICK, tu évoques un peu ça. Tu parles de la new wave en disant que t’étais de la new wave avant qu’il y ait la new wave. C’est clair qu’en termes d’innovation, tu as été chercher ces univers avant que ça n’arrive en France. Est-ce que tu as ressenti une certaine jalousie en voyant cette vague d’artistes arriver ? Comment as-tu vécu ça ?

Chanje
Artiste

Non, parce que j’ai pas inventé la roue non plus. Je suis pas du tout dans ce truc d’ego “ouais, c’est moi qui ai inventé ça, vous êtes mes tipeux, vous êtes mes gosses et tout.” Non, absolument pas. Il y a plein de gens qui ont fait ça, il y a Laylow, évidemment, qui a fait exploser ce style-là. Il n’y a pas du tout de haine. Moi, je crois en Dieu ; si ça se passe comme ça, c’est que ça se passe comme ça. Et je suis très content, pour l’instant, de ma carrière. Alors, évidemment, je te mentirais si je te disais que je n’ai pas envie d’un maxi disque d’or dans ma chambre (rires), mais non, comme je t’ai dit, il y a certains artistes qui faisaient ça bien avant moi : Sevdaliza, Die Antwoord, ils font ça depuis bien plus longtemps que moi. Je n’ai rien inventé, et si ça s’est popularisé, tant mieux, c’est que les gens aiment bien. Maintenant, moi, je me renouvelle aussi, tu vois.

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Est-ce qu’aujourd’hui ce sont des artistes que tu écoutes et qui peuvent t’inspirer ?

Chanje
Artiste

C’est vraiment pas du tout la musique que j’écoute. En vrai, si j’étais pas moi, je ne m’écouterais pas. J’suis un peu toqué sur les sons : je vais écouter les mêmes en boucle, je vais écouter Niro et JRK19 pendant 8 mois sans rien écouter d’autre. Donc non, ce sont pas tant les artistes que j’écoute, mais aussi je pense que, vu que c’est de la musique que je fais, j’ai pas trop envie d’écouter ça, parce que j’en bouffe déjà. Puis je plaide coupable : je suis pas un maxi digger, je découvre des sons, mais je ne suis pas un mec qui va écouter les sorties tous les vendredis. 

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Il y a une certaine dualité entre l’intro “NO MORE HUMAIN” et le titre éponyme “HUMAIN” ? Ils semblent s’opposer, mais ils abordent un thème assez similaire. Est-ce que tu peux nous en dire plus sur la relation entre ces deux morceaux ? Est-ce que “HUMAIN” vient répondre à l’intro, ou est-ce qu’ils se complètent pour explorer différents aspects d’une même idée ?

Chanje
Artiste

En gros, déjà, le morceau, je l’ai appelé NO MORE HUMAIN parce que c’est une référence aux X-Men. Je t’explique : à un moment, il y a la sorcière rouge qui dit “no more mutants” et elle est tellement forte avec ses pouvoirs qu’en gros, les mutants cessent d’exister ; les gènes mutants disparaissent. C’est un très gros événement dans les comics X-Men, et donc je l’ai appelé NO MORE HUMAIN. Après, HUMAIN, je l’ai fait avant NO MORE HUMAIN, donc je n’ai pas pensé à un lien direct. Je vais pas faire le mytho, mais maintenant, ils parlent à peu près de la même chose. HUMAIN, c’est une suite de NO MORE HUMAIN dans le sens où, dans NO MORE HUMAIN, je parle du fait que, enfant, je trouve le monde magnifique, super beau, et qu’en fait, on me dise “nan nan, t’inquiète, arrête ça, le monde, il est à chier, brûle ce que t’as à brûler”, comme si le monde avait fait de moi un monstre. Dans HUMAIN, c’est vraiment un son sur la haine contre ce monde-là. “Le monde, il peut crever, ça m’ira”, c’est vraiment la haine de ce monde-là. C’est vraiment : vous savez quoi, niquer vos mères, allez crever, c’est bien.

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En ce qui concerne la production du projet, tu as énormément travaillé avec Herman. Ça fait un moment que vous travaillez ensemble. Est-ce que tu peux nous parler de votre relation et de comment vous vous êtes connus ?

Chanje
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On s’est connus par mon producteur actuel, Léo Thomelet, qui gère le 386 (label de Chanje). Léo m’a repéré et on a commencé à bosser un peu ensemble. Il m’a présenté Herman, et au début, j’aimais pas ce qu’il faisait en termes de prods. Après, on a passé une soirée ensemble à produire. J’étais encore avec mon groupe Objectik, avec mon pote Diez, à qui je passe un big up. On s’est rencontrés comme ça, et depuis, on bosse ensemble, que ce soit pour la scène ou pour la musique. Maintenant, Herman a un rôle de réalisation artistique sur mes projets. C’est-à-dire que je travaille les prods avant, je commence à peu près toutes mes prods et je les fais retravailler par d’autres personnes ou je les retravaille avec d’autres gens. Puis, quand on m’envoie des prods, je retravaille dessus aussi. Ensuite, quand tout est à peu près prêt, je ramène Herman et on fait de la réalisation ensemble. On a une grosse phase de réalisation à deux, on retouche un peu tout le projet, on rajoute des textures, on se dit ce qui va ou ce qui ne va pas, donc il arrive en chef des travaux finis et il ajoute sa petite magie après. 

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Toujours pour parler de collaboration, il n’y a aucun feat sur le projet, à part Empty7 sur l’interlude. Est-ce que c’était voulu de ta part de ne pas avoir de feats ? Pourquoi avoir collaboré malgré tout sur cette interlude ?

Chanje
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En fait, à un moment, on était en mode : “Ah, mais il faudrait un feat, ce serait bien sur le projet.” On a demandé et on s’est fait refuser quelques feats. Après, on s’est demandé : “Est-ce qu’on a vraiment besoin de feats ? Est-ce que ça sert le projet ou on veut faire un feat juste pour faire un feat ?” À ce moment-là, plus personne ne voulait faire de feat dans l’industrie, c’était une catastrophe. On s’est dit que le projet n’en avait pas besoin et qu’on l’aimait comme ça. 

Concernant Empty7, c’est un très bon ami. On s’est retrouvés en studio et c’était un morceau qu’on avait commencé à bosser il y a un an. J’étais en mode : “Ça tue si le seul feat c’est une interlude.” On a donc fait ça en une soirée au studio et c’était dans le projet. Mais voilà, on ne voulait pas aller chercher des feats juste pour le principe. On était en mode : si ça arrive et qu’il y a une connexion, que ça roule et qu’on kiffe la vibe, c’est génial. Mais si c’est pour forcer parce que c’est bien pour le marketing et la promo, on s’est dit non.

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Dans ton projet, je trouve que chaque morceau véhicule une émotion différente. On peut autant être énervé contre le monde que le pleurer ou ressentir de la nostalgie. Je ne demande pas souvent ça, mais est-ce qu’il y a un morceau que tu préfères aux autres, qui te tient particulièrement à cœur pour x ou y raison ?

Chanje
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Ouais, je pense que c’est le dernier, SANS MOI. Après, je pense que c’est à titre personnel parce qu’il raconte ce qu’il raconte. Chacun y comprend ce qu’il veut, c’est aussi ça qui est beau avec la musique. Pour moi, c’est vraiment un beau morceau, j’en suis très content. J’ai pris un ukulélé et j’ai enregistré la prod en trente minutes, et j’adore le côté homemade de ce truc. Après, sinon, je les adore tous. J’aime beaucoup PAS DE CHANCE et CANIS CANEM, parce que je fais pas des morceaux très joyeux de base. Et d’avoir réussi à faire ça, je suis content frère (rires). Mais, en vrai, mon préféré, c’est SANS MOI.

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J’aimerais qu’on aborde un peu tes influences. J’ai pu lire que les premières claques que tu t’es prises, c’étaient la génération de Sexion d’Assaut et d’1995. Mais je sais qu’en vrai, derrière, tu t’es mangé plein d’autres choses. T’es même revenu en arrière, dans C’EST PAS L’HIVER C’EST MOI, tu fais même référence à “À chaque jour suffit sa peine” de Nessbeal. Je voudrais pas te demander qui sont les premiers artistes que t’as écoutés, mais plutôt ceux qui t’ont fait grandir, qui t’ont appris et qui t’ont, en quelque sorte, permis d’être celui que t’es aujourd’hui, que ce soit en tant qu’humain ou en tant qu’artiste ? 

Chanje
Artiste

C’est très intéressant. Déjà, je pense que c’est impossible de ne pas mentionner Booba. Toute ma vie, ça a été un des artistes que j’ai le plus écoutés. Après, c’est terrible parce que ce sont les mêmes que je cite à chaque fois (rires), mais Niro et Youssoupha, pour moi, ce sont mes deux artistes rap préférés. Ils sont dans mon top 3 all time. En vrai, mon top 3, c’est Booba, Niro et Youssoupha. Ensuite, un album qui m’a vraiment marqué à l’époque et qui, même aujourd’hui, n’a pas tant vieilli, et c’est rare pour les albums de cette époque ; c’est Un petit pas pour Lemsi d’Hayce Lemsi, sorti en 2012. Je l’ai trouvé trop fort et il m’a marqué. Je me rappelle, je m’étais dit : “Cet album, il tue sa race.” Et franchement, Mes Repères de La Fouine aussi, c’était trop chaud.

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Tu t’es surtout pris le rap français avant de te prendre les cainris ?

Chanje
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Ouais, j’suis pas le meilleur gars en cainri encore. Je suis deux fois plus rap français que rap cainri, c’est une catastrophe. Et pourtant, mon blaze vient de 2Pac avec son titre Changes (rires). Mais non, y a des artistes US que j’arrive pas à écouter, il y a des délires que j’adhère pas.

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Ton univers a toujours été assez obscur, quelque peu étrange, ce qui, au premier abord, s’apparente plutôt au passé. Mais d’un autre côté, tu es identifié comme un artiste très innovant, avec des morceaux paraissant plutôt futuristes. Dans ton esprit, en tant qu’artiste, est-ce que tu te sens plus inspiré, plus touché par le passé ou plutôt par les aspects futuristes ? Qu’est-ce qui te parle le plus musicalement parlant ?

Chanje
Artiste

C’est drôle, parce que j’ai pas pensé à cette notion de temps en faisant le projet. Après, je parle beaucoup du passé, parce que c’est un truc qui marque, qui fait un homme, même s’il ne faut pas s’y accrocher. Mais c’est vrai que je n’ai pas réfléchi à une temporalité. Musicalement, sur les sonorités, au final, il y a beaucoup d’éléments du passé. La moitié des sons, c’est du piano. Il n’y a que -18 000 FLOCONS qui est très futuriste, très électro, mais ça, c’est la touche de TAEMINTEKKEN (beatmaker) et ça me faisait plaisir. Sinon, le reste part d’éléments du passé pour en faire des trucs du futur.

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J’avais trouvé ça intéressant dans le sens où j’ai l’impression que c’est plus le passé qui t’inspire. Même la musique que tu écoutes, c’est plutôt des choses qui datent de manière générale. Ta manière de produire et de réfléchir utilise beaucoup d’éléments du passé pour, au final, avoir un rendu qui sonne très futuriste. Iil y a une dualité que je trouve très intéressante. On arrive à la fin de l’entretien. Qu’est-ce qu’on peut te souhaiter pour la suite ? Est-ce que tu as des objectifs, des ambitions précises que tu aimerais atteindre dans ta carrière ?

Chanje
Artiste

Continuer à faire de la bonne musique, se développer encore plus, toucher encore plus les gens, essayer de me découvrir encore plus artistiquement. Devenir extrêmement riche, c’est quelque chose qui me botte bien aussi (rires). Si je pouvais avoir un petit million tout de suite, je dirais pas non. Mais sinon, faire de la bonne musique et être heureux, c’est le plus important. Être heureux.

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