Infinit’ : De la précision à l’instinct, l’héritage de la mixtape - Mr LE FAIRE

Crédit Photo : Eloi Tezenas

Dans le paysage rap, certains noms résonnent comme des garants d’une exigence technique et artistique. Infinit’ en fait partie. Membre clé du label Don Dada et proche d’Alpha Wann, l’Azuréen s’est imposé au fil des années comme l’un des rimeurs les plus affûtés de sa génération. Entre Nice et Antibes, il représente un Sud-Est souvent dans l’ombre des places fortes du rap français, mais dont il incarne la finesse et la rigueur. Reconnu pour sa précision chirurgicale, son sens du détail et sa science des références, Infinit’ ne se limite pourtant pas à un simple exercice de style. Derrière ses multisyllabiques affûtées, il insuffle une vraie musicalité à son rap, intégrant des notes vocales subtiles qui enrichissent son univers. Une identité forte qu’il a façonnée au fil de projets marquants, de Ma vie est un film à NSMLM, en passant par son premier véritable album 888, sorti début 2024 sous pavillon Don Dada. Un projet dense et léché, qui posait les bases d’un rap aussi technique que précis, toujours imprégné de sonorités et d’influences pointues. 

Avec Mr LE FAIRE, Infinit’ revient à une approche plus brute et instinctive, renouant avec l’essence même de la mixtape. Un exercice où il peut laisser libre cours à sa virtuosité, entouré d’un casting XXL et porté par un héritage qui traverse les époques. Si 888 était une démonstration de force millimétrée, Mr LE FAIRE est une balle tirée sans sommation. Ici, pas de concept alambiqué ni de storytelling appuyé : Infinit’ rappe avant tout pour le plaisir, et ça s’entend. “J’avais besoin d’une récréation, je voulais juste flinguer avec les copains”, confie-t-il. Une parenthèse ? Plutôt une détonation.

Mixé en live par son fidèle DJ Furio, sound designé par l’orfèvre JayJay et hosté par le légendaire Jacky Brown, le projet reprend les codes des grandes mixtapes US : un format pensé pour être écouté d’une traite, des interludes qui donnent une cohérence à l’ensemble et un casting qui pèse lourd. La famille Don Dada/Saboteur en force avec Alpha Wann, Deen Burbigo et OG L’enf, mais aussi Veust, le vétéran du sud, et une poignée de rappeurs aussi précis qu’iconoclastes, de Mairo et H JeuneCrack à Zequin et Limsa d’Aulnay. En guise de clin d’œil à sa terre natale, Infinit’ s’approprie même Monaco, single des Antibois Soleil Noir, qu’il rebaptise avec sa patte unique.

Un tracklisting qui respire l’efficacité, à l’image du rap de son auteur. Infinit’ n’a plus rien à prouver en termes de technique : son maniement du verbe est chirurgical, chaque ligne découpe, chaque phase trouve son écho. Mais ce qui fait de lui un kickeur à part, c’est sa capacité à casser son propre rythme, à proposer une note vocale inattendue ou à glisser une référence pointue qui force le replay. L’école du Sud-Est, mais avec un passeport pour Atlanta. “Si tu me cherches, je suis à A-Town”, lâche-t-il, en hommage à une époque où les mixtapes étaient la colonne vertébrale du rap, sur LiveMixtapes et Datpiff, avec les icônes du Dipset, de G-Unit et de Max B, jusqu’à la génération dorée d’Atlanta.

À l’heure où le terme est galvaudé, Infinit’ redonne à la mixtape son essence première : un laboratoire de performance, un terrain d’expérimentation où seuls comptent le plaisir et l’adrénaline du kickage. Mr LE FAIRE n’est peut-être qu’une “récréation” pour lui, mais pour nous, c’est un rappel magistral que certains n’ont pas besoin d’artifices pour marquer au fer rouge.

Cover de Mr LE FAIRE par Lucas Gouet

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